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Actualité syndicale

OFUP

Pourquoi l'OFUP n'a pas sa place dans les universités
OFUP manipulation, mensonges, exploitation, ça suffit!

témoignage d'une étudiante de Montpellier (juillet 2006)

Je suis une étudiante qui entre en 2ème année de droit à Montpellier. Comme beaucoup j’ai voulu travailler cet été et à chaque fois je tombais sur cette annonce : « Cherche vendeur conseiller presse », pas d’expérience obligatoire, pas de limite d’age. Donc je me suis inscrite en ligne. On m’a donné une date pour une réunion le 5 juin à 14h. Il fallait amener un RIB, une photocopie de sa carte vitale et de sa carte d’identité.

La procédure de sélection

Quand je suis arrivée on était une vingtaine. La salle était trop petite et quelques personnes sont restées debout. La responsable s’est présentée et nous a demandé de venir chacun notre tour faire de même. Simple processus où il s’agit de dire comment on s’appelle, ce que l’on veut faire plus tard, et pourquoi on est là. La responsable prenait des notes sur tout.

Ensuite elle a présenté l’OFUP, « Office Universitaire de Presse ». Sorte de grande entreprise au service des étudiants, où il fait bon vivre pour ceux qui y travaillent. « Une grande famille où il n’y a pas de hiérarchie ». Moi j’étais assez emballée. Elle nous a parlé du paiement à la commission en le légitimant par rapport au fait que quelqu’un payé à ne rien faire n’est pas juste par rapport à celui qui s’investit et qui est payé pareil. Pourquoi pas. La moyenne du revenu des vendeurs était le SMIC nous a-t-elle dit.

Ensuite il y a eu des tests pour voir si on correspondait au profil de l’OFUP. Un exemple, « vous avez gagné 100 millions d’euros, trouvez quelque chose à faire avec ». Le but étant de voir si on est dynamique et social. A 18h on y était encore. Les entretiens individuels sont arrivés. Après encore 1h d’attente on m’a annoncé que j’étais sélectionnée. J’ai eu la sensation bizarre d’avoir été prise par un jeu télévisé. Elle m’a donné mon contrat et m’a demandé de le signer. Je sais que je n’aurais pas du mais j’étais épuisée alors je l’ai signé et rempli sans faire attention. A 19h15 j’étais enfin dehors.

Les journées de formation

Je devais commencer à travailler fin juin et tout le mois de juillet. Le 20 juin (2 semaines après la réunion) la responsable locale de la ville où j’allais travailler, m’a appelée pour me dire que la formation débuterait le 28 juin à 9h. Quand je suis arrivée on a eu droit à un accueil assez froid de notre responsable, elle nous a serré la main et nous a demandé de la suivre. La personne qui m’avait recrutée était aussi présente au fond de la salle mais sans son sourire et sa bonne humeur. Elle ne nous a pas adressé la parole de la journée. On a appris le déroulement d’une technique de vente avec ses différentes étapes. On nous a donné des phrases types pour chaque passage. Je pensais que c’était un exemple mais il fallait les dire mot pour mot. La première que je retiens vraiment bien est la suivante : « Bonjour, je m’appelle X, je suis étudiante en telle année de telle filière, et je suis également conseillère au sein de l’Office universitaire de presse. Je suis là pour te conseiller sur différentes revues qui vont te permettre de réussir tes études, comment tu t’appelles ? » Quand mon équipe l’a lue, on a tous explosé de rire, ce qui a énervé notre responsable qui s’est empressée de rajouter qu’elle avait passé 5h à faire cette « TDV (technique de vente) ».

Une fois les étapes vues, on est allé dehors pour s’entraîner, ce qu’ils appellent « training ». L’OFUP aime beaucoup les mots anglais, les sigles. Une personne faisait le courtier l’autre l’étudiant. Bien sûr on se prêtait tous au jeu. Mais au bout de 2h on ne pouvait quand même pas retenir les 20 phrases de la première partie. Après chaque exercice, ma responsable était là avec ses feuilles. Elle nous demandait nos points forts et nos points à améliorer (ne pas dire point faible, cela rabaisserait la personne). Puis elle nous disait ce qu’elle en avait pensé en nous demandant de répéter pour voir si on l’écoutait. Cela a duré 4 jours, dans une salle où il faisait 35°C. De 9h à 13h, et de 14h à 18h. On a aussi appris à nous servir de notre « folder », catalogue où sont répertoriées toutes les revues avec prix et référence. On a appris à monter un stand, on a porté et reporté des revues de sa voiture à la salle et vice versa. Au début on s’entraînait à vendre un abonnement et on nous a vite appris qu’il fallait en fait vendre un pack de 3 revues aux étudiants en fonction de la filière choisie. Le pack revenait ainsi à 150 euros environ pour l’année. Si vraiment ça ne marchait pas on pouvait casser le pack. Il faut savoir que les prix sont tous les mêmes. Ce n’est pas parce que vous prenez un pack que vous faites des économies. Ce sont les mêmes réductions juste additionnées.

A la fin de la journée elle faisait un tour de table. L’ensemble de l’équipe était à peu près satisfait, on attendait de voir le terrain. Ce qui nous maintenait c’était surtout l’équipe. 6 vendeurs, et le contact est bien passé dès le début, heureusement. Il y a des jours où on était fatigué et où l’on voulait adoucir l’ambiance assez stressée, mais la responsable ne riait pas du tout, même si elle n’avait que 18 ans, son rôle était de nous former (formater ? ). Quand ça se radoucissait on posait des questions, pourquoi la fac n’avait pas accepté notre stand et pourquoi on allait travailler dehors sous le soleil ? Pourquoi tel mot avant tel mot ? Ils répondaient toujours à côté. Et si l’on n’était pas d’accord avec les méthodes, on pouvait partir.
La dernière partie de la formation était d’apprendre « le rabattage ». C'est-à-dire faire venir un maximum de personnes au stand. Les entraînements ont été assez violents car on ne rentrait pas du tout dans le profil. Si 15 personnes arrivaient il fallait toutes les retenir. On nous a dit de prendre les personnes par le bras, de crier, de les rassembler et de s’imposer. Ce qui nous a fait exploser, c’est quand on nous a dit que si pendant une vente on voyait une personne passer, il fallait se lever et aller la chercher, la faire patienter. Finalement, la situation était tellement tendue que notre responsable a calmé le jeu. Dès que quelque chose ne se passait pas comme il fallait, la responsable adoucissait ses paroles et nous valorisait. Sinon elle prenait la personne dans un coin et la félicitait sur son travail en lui demandant de ne pas ébruiter ceci. Le but était de nous garder. Plus on a de vendeurs mieux c’est. La formation avait commencé le mercredi, le vendredi, une personne partait. Le lundi on avait notre dernier jour de formation, on était au point et déjà plus détendus.

Les journées de travail

Le mardi c’était notre premier jour de travail. Nous étions 4 sur le site. Un IUT, mais dans une petite ville, c'est-à-dire 4 inscrits par heure (mais ça, on ne nous l’avait pas dit). Comme on n’avait pas le droit de rentrer, notre stand devait se situer sur les places de parking en face du bâtiment. On est arrivé à 7h15 le matin pour être le mieux placé. On a monté notre stand en quelques minutes puis il a fallu mettre des affiches partout pour attirer l’attention. Le problème c’est que les gens de l’OFUP travaillent en intérieur donc ils collent les affiches sur les murs. Ici on ne pouvait pas vraiment le faire donc comme il y avait du vent, tout partait c’était insupportable.

Le matin comme personne ne venait, on nous a demandé de vendre au lycée qui se trouvait à côté. Les élèves venaient chercher les résultats du bac et il fallait leur sauter dessus. Certains étaient au rattrapage donc on ne voulait pas insister, mais notre responsable nous a poussé pour qu’on ramène le plus de monde. Toutes les 2h il fallait faire le « reporting ». C’est un tableau où l’on note le nombre de personnes abordées, de personnes assises au stand, d’abonnements vendus… tout ! Si à l’heure précise on ne donnait pas les chiffres on avait droit à des cris hystériques.

J’avais été nommée responsable de site (l’autre site était la fac) au moment où j’étais le moins motivée. Je pensais à une promotion mais en fait ça voulait juste dire que je m’occupais du reporting de tout le monde et qu’en plus je devais aller voir les mutuelles étudiantes le matin pour demander le nombre d’inscrits. Le chiffre était toujours très faible. A midi on nous a annoncé que les inscriptions ne commençaient que l’après midi (d’où le peu de monde). On a eu une heure de pause déjeuner et on a retravaillé jusqu’à 17h20 environ. Il a fallu ranger le stand dans la voiture d’une personne de l’équipe (la seule ayant une voiture). Notre responsable a voulu faire un débriefing (ils sont fous de ça). Moi je n’avais vendu qu’un pack, les autres 2 ou 3. On nous a dit qu’on était bien sûr loin du compte mais que c’était un début. Je suis rentrée chez moi à 18h30. Il fallait encore que je lise les revues que j’allais vendre et préparer les arguments en leur faveur pour pouvoir les proposer. Le temps de manger, à 23h j’y étais encore.

Le mercredi ça repartait. A 7h15 sur le terrain, à 7h30 le stand était monté. J’ai appris une heure après que les inscriptions commençaient à 9h mais ça, on ne le savait pas non plus ! Ma responsable locale n’était pas là mais celle qui m’avait recrutée et qui a un poste encore plus élevé est arrivée vers 10h. Il fallait sans cesse aller voir les personnes qui passaient. Leur faire comprendre que c'était obligatoire de passer au stand. On les tutoyait pour faire apparaître le côté supérieur qu'on avait par rapport aux premières années. Et il fallait avant tout les "effrayer" sur les années post bac, pour leur faire comprendre que s'ils n'avaient pas les revues, ils ne pourraient jamais s'en sortir, et on renforçait cela en se posant en exemple, "moi j'ai pris un abonnement en première année et je n'aurais jamais eu la moyenne dans cette matière sans cet apport de lecture".On avait des réponses pour chaque objection, pour les déstabiliser et que finalement ils nous écoutent. Si la personne disait « je n’ai pas d’argent » je répondais « tu as combien ? », « tu n’as pas à payer tout de suite ». Il ne fallait jamais poser de questions fermées. Toujours faire parler la personne. En plus de vendre les packs très chers pour des étudiants, il fallait essayer de les faire absolument payer par Internet, par mail. La fois où j'ai réussi à vendre, la personne n'était pas encore sûre de son adresse à cause des vacances, j'ai fait un arrangement pour qu'elle ne paie que fin août. Ma responsable m'a carrément prise à part et m'a humiliée sur mes techniques en me cassant sur chaque point de ma vente. C'est à ce moment que j'ai décidé de partir, là elle a été très gentille d'un coup, elle m'a dit que j'étais la meilleure courtière (je suis celle qui a vendu le moins) que c'était dommage, et que c'était de ma faute si je ne vendais pas car je n'appliquais pas leurs méthodes au pied de la lettre. Elle était là à chaque moment où on essayait de vendre, elle notait tout et après venait nous reprocher tout ce que l’on n’avait pas fait et nous disait qu’on ne vendrait jamais en faisant ça.

En une semaine je n'ai gagné que 33 euros et encore ils m’ont retiré 5% du total pour les charges (plus on gagne plus les charges sont importantes). Ma responsable a un fixe. En plus elle touche des intérêts sur nos commissions (voilà pourquoi on doit beaucoup vendre). Les catalogues affichés sur le stand sont pour elle. C'est-à-dire que si une personne le prend et renvoie le bon de commande, elle touche de l’argent. Nous on a le droit aussi à ces catalogues avec notre numéro de courtier derrière mais on ne peut le donner qu’à une vente et aux personnes qui s’assoient. On touche 3 euros là-dessus et ça ne peut augmenter.

Dans mon équipe certains venaient en train tous les matins et tous les soirs, se levaient à 5h. Une autre (qui est partie aussi) avait une voiture donc elle portait le chargement (le stand, tables, chaises, revues…) et n'avait aucune indemnité alors que le critère de la voiture n'est pas décisif. On a appris au bout de 2 jours de travail que certains n'avaient pas encore signé leur contrat, donc ils travaillaient vraiment gratis. Au début dans les annonces on devait travailler le mois de juillet entier, finalement en comptant il n'y avait que 18 jours de travail, vu la paie, on ne va pas loin. Normalement à l'OFUP on ne travaille pas le week-end, on nous a demandé parfois de travailler le samedi. Que de surprises qui s'ajoutent, plus la pression...

Notre contrat nous désigne comme mandataire libre indépendant. C'est à dire pas d'horaires, pas d'objectifs et pas de salaire fixe. La seule vérité reste le salaire. Les conditions ne sont pas terribles du tout (ma responsable a même fait une insolation le premier jour de travail), et le paiement à la commission s'effectue par système de gammes. Les revues sont classées en plusieurs catégories de prestige. Il faut vendre 15 abonnements de chaque gamme pour toucher la rémunération maximum qui est de 9 euros environ. La responsable de recrutement nous avait dit que cela se faisait en 2jours, et en plus elle avait dit à la réunion que c'était 15 abonnements au total, pas dans chaque gamme !!!! Bref, on commence à 3euros, et on y reste longtemps. Mes collègues on mis une bonne semaine et encore à passer leurs gammes. Quand je suis partie en leur faisant comprendre que je ne changerais pas d’avis, ils m’ont laissé des bons de commande et des catalogues si jamais je voulais encore vendre à des gens de mon entourage ou dans la rue.


les documents reçus par les "conseillers vendeurs"
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